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Dossier Sarkozy et la droite (1)

mercredi 4 juillet 2007

La nazification de Sarkozy n’a pas empêché une partie significative des travailleurs de voter pour lui

Cinq années de propagande inepte de la gauche (en partie grâce au futur « traître » Eric Besson !), de l’extrême gauche et d’une grande partie des libertaires n’ont servi qu’à renforcer l’image positive de Sarkozy et de l’UMP auprès d’une partie des petits salariés et des plus démunis comme en témoignent les résultats des élections présidentielles et législatives.

Selon Jacques Serieys (http://www.prs12.com/article.php3?i...), au premier tour des présidentielles, Sarkozy a obtenu 17 % des voix chez les ouvriers ; 25% chez les employés ; 28% chez les professions intermédiaires (agents de maîtrise) et professions intellectuelles (enseignants) ; 31% parmi les cadres et 37% chez les chefs d’entreprise, commerçants et artisans.

Si l’on tient compte de l’appartenance syndicale Sarkozy a obtenu chez les adhérents de la CGT : 11% ; FO : 20 % ; CFDT : 20 % ; UNSA : 20 % ; CGC : 60 % ; et enfin, cerise sur le gâteau, MEDEF et CGPME : 96 %. Quant au second tour Sarkozy a obtenu 46 % chez les ouvriers et 49 % chez les employés - du moins chez ceux qui ne se sont pas abstenus, c’est-à-dire un bon paquet. Qu’est-ce qui a poussé les électeurs à voter pour Sarkozy ? Quand les instituts de sondage les ont interrogés sur leur motivation principale, entre « plus d’ordre et plus d’autorité » ou plus de libertés individuelles, 83 % des électeurs de Sarkozy ont choisi, on l’aura deviné, la première solution. Mais on notera aussi que, avant l’élection, 60 % des électeurs favorables à Sarkozy identifiaient leur petit réac chéri à l’idée d’un changement profond, alors que ce n’était le cas que de 30 % des électeurs de Ségolène Royal. La propagande grossière et mystificatrice de l’UMP contre « l’immobilisme » (y compris donc son propre immobilisme puisqu’au cours des trente dernières années la droite a été au pouvoir presque la moitié du temps) a apparemment fonctionné. En tout cas, ce qui nous semble évident c’est que l’assimilation de Sarkazy au (néo)fascisme, à Vichy II, à Hitler, ou même au bushisme, au berlusconisme, à l’aristocratie hongroise, en bref au « Parti de l’Etranger » a été non seulement stupide sur le plan politique mais contreproductive sur le plan électoral. Ou alors il faudrait en déduire qu’un bon quart de la classe ouvrière est composée de (néo)fascistes, de pétainistes et de bushiens. Et il faudrait ajouter aux électeurs sarkozytes ceux du Front national : rappelons qu’en 2002 un ouvrier sur quatre et 23 pour cent des électeurs gagnant moins de 1500 euros ont voté pour Le Pen.

Evidemment une telle conclusion (un quart des prolétaires seraient des électeurs (néo)fascistes), personne, dans la gauche ou l’extrême gauche parlementaires, n’ose ni la faire, ni en tirer les conséquences éventuelles. Les accusations de « fascisme » sont lancés de façon purement démagogique, et ceux qui les utilisent ne savent le plus souvent même pas ce que ce mot signifie (2). A notre avis, même si ce n’est évidemment pas le seul facteur expliquant l’élection de Sarkozy et la victoire de l’UMP au second tour, la propagande mal ciblée contre le futur Président a surtout fait le jeu de la candidate PS qui s’est présentée en rempart de l’« ordre juste » contre le « désordre » sarkoziste. Avec le résultat que l’on sait...

En second lieu, elle a involontairement fait le jeu de la droite (qui a réussi à attirer une bonne partie des voix du Front national, d’ailleurs lui-même qualifié à tort de « fasciste » depuis 20 ans, sans que cela lui fasse jusqu’ici perdre la moindre voix aux élections) en faisant passer Sarkozy pour une victime. Lui le « fils d’immigré » qualifié de « fasciste », voire de « nazi » ? Lui un « bushien », un « traître à la Nation » alors qu’il n’arrête pas de faire l’éloge du général de Gaulle ? etc. Plutôt que de se concentrer sur son programme économique et social, clairement opposé aux intérêts des travailleurs, une bonne partie de la propagande anti-Sarkozy s’est échinée à faire de lui plus qu’un simple ennemi de la classe ouvrière. Un monstre. Et la caricature s’est finalement retournée contre ses auteurs. Quand une analyse ne marche pas il y a deux solutions :
-  continuer comme avant. Apparemment, c’est ce qu’ont décidé de faire la gauche comme l’extrême gauche parlementaires, voire des franges encore plus radicales qui nous promettent soit le (néo)fascisme pour demain soit des insurrections dans les banlieues et autres prédictions apocalyptiques. La Gauche pourrielle et les organisations trotskystes ont fait, après l’élection présidentielle, de grands moulinets afin de nous inciter à aller voter pour elles aux législatives de juin 2007. Et malgré la veste qu’elles se sont prise, elles ont quand même toutes eu le culot de trouver quelque chose de positif à leurs résultats électoraux, oubliant que l’abstention était passée de 16 à 39 % entre les présidentielles et les législatives de 2007. Pas mal pour des partisans de la démocratie électorale...

D’autres, anarchistes, libertaires, etc., veulent se (et nous) doper aux amphétamines d’un antifascisme mythologique. Or comme comme nous devrions tous le savoir, les partis « antifascistes » chaque fois qu’ils se sont retrouvés au pouvoir ont fait marner les ouvriers autant que leurs prédécesseurs.
- Ou alors reconnaître que l’on s’est lourdement trompé et se demander ce qui a pu clocher dans les analyses avancées depuis 5 ans contre Sarkozy. Les articles de ce dossier consacré à Sarkozy et la droite, donnent quelques éléments pour mieux comprendre qui était Sarkozy avant son élection et comment il a pu devenir président. En tout cas nous sommes sûrs que le président actuel n’a rien d’un nazi, d’un fasciste, ni même d’un libéral (1) pur jus, même s’il est bien sûr un fervent adepte du Capitalisme et de l’esclavage salarié.

Y.C.

1. La notion de « libéralisme » est une notion très ambiguë pour ses partisans comme pour ses adversaires confus. A droite, elle est le prétexte pour critiquer les actions « redistributrices » de l’Etat (qui consiste à prendre les cotisations sociales versées par les célibataires, les bien-portants et ceux qui ont un boulot fixe pour les redistribuer à ceux qui ont des enfants, qui sont malades ou chômeurs), sauf quand elles se font en faveur des patrons (on n’a jamais vu un patron protester contre une subvention ou une loi anti-ouvrière). A gauche et à l’extrême gauche, elle est une façon de réclamer l’étatisation (partielle ou totale) du Capital, sans pour autant appeler au renversement du capitalisme, à la suppression de la hiérarchie, du salaire et de la division du travail. Dans les deux cas, les mots « libéralisme » ou « néo-libéralisme » empêchent d’envisager même la possibilité de supprimer le salariat, comme mode d’exploitation. C’est pourquoi nous préférons ne pas les utiliser.

2. Sur le site néo-stalinien Bellaciao, Jacques Richaud (http://bellaciao.org/fr/article.php...) affirme ainsi doctement, à partir de quatre citations de Sarkozy associant les mots « liberté » et « travail », que la devise « Arbeit macht frei » (Le travail rend libre) figurant au fronton des camps de concentration aurait inspiré l’UMP !!! Il ignore, tout comme les sites Indymedia et même ceux de la CNT-AIT sur lesquels on a pu lire des « raisonnements » aussi creux et ridicules, que l’on peut retrouver ce genre de rapprochement entre « travail » et « émancipation » chez toutes sortes de gens, des féministes à Tony Blair !

Le dénommé Richaud va jusqu’à affirmer que les nazis auraient commencé par introduire un certain nombre de mots dans le vocabulaire politique et à les banaliser pour mieux s’emparer du pouvoir. Il n’a sans doute jamais entendu parler du premier putsch manqué de Hitler à Munich en 1923, des corps francs, des sections d’assaut (SA ou chemises brunes) du NSDAP, de tous ceux qui pendant dix ans ont semé la terreur dans les quartiers ouvriers en Allemagne, attaqué les réunions des partis communiste et socialiste, les sièges des syndicats, assassinant les militants ouvriers, brûlant les permanences, etc. Ce crétin prétentieux croit que le fascisme se limite à un problème de changement lexical, qu’à la limite un publicitaire doué à la tête d’une puissante agence pourrait imposer dans le langage commun.

A lire ce genre d’âneries, on regretterait presque la propagande du PCF des années 30 ou 50 qui au moins expliquait que les fascistes italiens comme les nazis allemands se sont appuyés sur des organisations de masse regroupant des chômeurs, des petits-bourgeois ruinés, des anciens combattants et une fraction de l’armée, et qu’ils n’ont pas pris le pouvoir grâce à une simple victoire linguistique, mais par l’usage systématique de la violence contre les syndicats et partis ouvriers et l’organisation de milices paramilitaires !

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