Tous les textes publiés dans ce livre figuraient déjà dans le tome 1 des écrits de Karim Landais, Passions militantes et rigueur historienne, publié en 2006, après sa disparition. La première partie est constituée par le DEA qu’il présenta en 2004, et par (presque toutes) les interviews qu’il réalisa pour ce diplôme universitaire, la seconde partie par quatre articles publiés dans diverses revues ou inédits de son vivant.
Trois personnes interviewées par Karim pour son DEA ont souhaité que leurs déclarations ne soient pas intégralement reproduites. Cela posait cependant un problème pour l’édition de ce texte puisque leurs propos étaient cités par Karim. Nous aurions donc été obligés de supprimer non seulement leurs citations mais aussi tous les raisonnements que l’auteur avait bâtis à partir de ce que ses « témoins » lui avaient confié ! Nous avons donc opté pour une solution de compromis : les affubler d’un pseudonyme pour que la cohérence des développements de Karim soit respectée et leur anonymat protégé. Quant à Pierre Broué il n’a pu malheureusement relire ses propos puisqu’il était décédé. Nous avons donc effectué quelques coupes signalées par le signe suivant : […]. Cet ouvrage est forcément incomplet puisque l’auteur n’en était qu’au début de ses recherches. De plus, il n’a pu ni choisir les textes ni apporter d’ultimes corrections à ceux qui étaient inédits ou inachevés. Soucieux de rigueur et de précision, peut-être aurait-il refusé que certains soient imprimés sous leur forme actuelle. Il nous a semblé néanmoins important que ses travaux universitaires aussi bien que ses articles politiques puissent circuler le plus largement possible, même lorsque ses réflexions étaient encore à l’état d’ébauche et auraient certainement évolué avec le temps et surtout la réflexion.
Au-delà des tâtonnements, des évolutions de Karim, ses textes montrent bien toute la difficulté aujourd’hui pour un jeune homme – il s’est donné la mort un mois avant son vingt-cinquième anniversaire – de concilier une activité militante « révolutionnaire » et une rigueur scientifique dans l’analyse, plus particulièrement dans le métier d’historien-chercheur qu’il aurait aimé exercer un jour.
Les brèves expériences militantes de Karim, de 1999 à 2005, n’ont pas répondu à ses formidables attentes de fraternité et de changement social. Pire, dans un certain sens, elles ont aggravé ses frustrations personnelles, théoriques et politiques, car son idéal profondément libertaire ne trouvait pas à s’incarner dans la fréquentation quotidienne de « camarades » ou de « compagnons » avec lesquels il aurait pu vraiment trouver un sens à sa vie. D’un autre côté, sa révolte contre la société capitaliste ne l’a jamais abandonné, ni sa volonté de comprendre pourquoi l’extrême gauche trotskyste et le mouvement libertaire avaient tant de mal à se remettre en question, à avancer dans la compréhension du monde, et surtout à mettre fin à l’exploitation et à l’oppression capitalistes. Deux présentations écrites par Nicolas Dessaux et moi-même précisent l’évolution de la pensée de Karim Landais durant sa (trop) courte vie parmi nous et ne préjugent évidemment pas des conclusions théoriques et politiques qu’il aurait dégagées s’il avait pu achever son travail sur les « relations de pouvoir dans les organisations révolutionnaires ». A notre connaissance, aucune étude universitaire sur le courant « lambertiste » n’a été publiée sous forme de livre jusqu’ici, ni aucun recueil aussi riche d’interviews d’ex-militants sur ce qu’il faut bien appeler une « secte », non pas au sens religieux du terme, mais au sens d’une organisation qui se détermine uniquement en fonction de ses propres intérêts de boutique, de micro-appareil, et non de ceux de la classe ouvrière dont elle se réclame... de moins en moins, d’ailleurs.
Loin de tout sensationnalisme journalistique, Karim Landais réfléchit et nous incite à réfléchir au fonctionnement d’une des « trois sœurs » du trotskysme français (aux côtés de LO et de l’ex-LCR majoritaire désormais au sein du NPA). Son objectif n’était pas de régler des comptes personnels, comme c’est souvent le cas des « ex », mais de tirer des leçons qui pourraient être utiles aux militants de tous les courants dits « révolutionnaires » qu’il entendait étudier. Nous espérons que sa démarche critique sera reprise et approfondie par d’autres dans le même esprit passionné, militant et scientifique qui était le sien.
Y.C., Ni patrie ni frontières
Ce livre de 600 pages coûtera 14 euros (frais de port compris) et sera disponible à partir du 25 juillet. Pour toute commande écrire à yvescoleman@wanadoo.fr
Table des matières
Introduction 1
Sur l’OCI-PCI et le trotskysme 3
Eléments pour une socio-histoire des relations de pouvoir ; Introduction à une étude de l’OCI-PCI 5
Entretiens et réponses au questionnaire 173
Présentation : « Il ne faut pas faire le jeu de l’ennemi de classe » 175
Entretien avec Pierre Broué 179
Entretien avec Michel Lequenne 214
Entretien avec Boris Fraenkel 238
Entretien avec Alexandre Hébert 257
Entretien avec Charles Berg 278
Entretien avec Pierre Simon 302
Entretien avec Vera Daniels 326
Entretien avec Christian Béridel 354
Entretien avec Vincent Présumey 393
Entretien avec Ludovic Wolfgang 435
Réponses de Nicolas Dessaux 479
Réponses de Charles Huard 502
Réponses de Marie-Cécile Plà 510
Quatre articles sur l’OCI-PCI et le PT 517
Au parti du mensonge déconcertant, inédit, avril 2005. 518
Le Pärti des travailleurs et l’Europe 524
Le lambertisme à la croisée des chemins, février 2005, inédit 531
Présentation critique (Nicolas Dessaux) 554
Militantisme et individualité au sein de l’OCI-PCI, intervention dans le cadre de la Journée d’études du 10 novembre 2004, organisée par l’IHC-UMR CNRS 5605 de l’Université de Bourgogne, parue en octobre 2005 dans les Cahiers d’histoire (revue d’histoire critique) n° 97. 557
Glossaire 573
Bibliographie condensée 597