mondialisme.org

Toyota et le toyotisme

mercredi 31 mars 2010

Ces deux textes parus dans Echanges en 1977 et en 1980 font partie d’un recueil à paraître en mai : Restructuration et lutte de classes dans l’industrie automobile mondiale.

Toyota, l’usine du désespoir

Echanges n° 10, 1977

Toyota, l’usine du désespoir a été écrit par un journaliste de gauche qui s’est fait embaucher six mois comme ouvrier sur la chaîne de montage de Toyota. Cela détruit le mythe du « miracle » japonais dans une nouvelle organisation, révélant que l’expansion du Japon et sa capacité à inonder le marché de produits à bas prix est fondée sur une exploitation forcenée. Les conditions décrites montrent les hommes poussés jusqu’aux limites, et au-delà, de l’endurance humaine. Il y a beaucoup de mécontentement individuel, exprimé à travers un absentéisme et un turn-over extrêmement élevés, mais, selon l’auteur, pas ou peu de résistance collective. Le livre ne se situe pas dans un contexte général et reste silencieux sur beaucoup de choses, mais est très utile pour sa description des conditions de travail.

Toyota, l’usine du désespoir, de Kanatu Sanoshi, Editions ouvrières, 1977, a été réédité en 2008 aux éditions Demopolis [256 p., 21 €].)

Echanges a publié deux brèves notes sur des ouvrages traitant des méthodes d’organisation industrielles dans son n° 94 (été 2000) :

Flux tendu, fordisme, toyotisme

« Tirée de l’obscurité de ses origines américaines, la méthode largement populaire de la production à flux tendu, souvent mise par erreur au crédit des Japonais, fait l’objet d’un article d’analyse historique dans le Journal of Management History.

D’après l’auteur, J. Petersen, les méthodes de production dans lesquelles les composants (pièces détachées) sont programmés pour arriver à la chaîne de montage juste au moment où elles sont nécessaires, dans le but de réduire les coûts de production, d’améliorer la cadence de production et de réduire les stocks, furent popularisées par le système de production mis en œuvre par Toyota au Japon et connurent ensuite un succès prodigieux. Questionné sur cette prétendue innovation, Taiichi Ôno, de Toyota, a reconnu que son idée était basée sur un livre écrit et publié en 1929 par Henry Ford, Today and Tomorrow (« Aujourd’hui et Demain »).

L’article de Petersen explore le rôle joué dans les concepts développés par Ford et par le pionnier expert en efficience — Frederick Taylor — dans ses Principes de « management scientifique ». Il évoque aussi les travaux largement oubliés d’Ernest Kauzer. Kauzer doit être crédité d’avoir développé une première version de la production à flux tendu à l’usine de tracteurs Fordson pendant la première guerre mondiale, mais ajoute que c’est à Ford lui-même qu’il revient d’avoir appliqué ces méthodes à grande échelle dans toutes les usines Ford pendant les années 1920 et 1921. Bien que Ford et Kauzer reconnaissent pleinement ce qu’ils devaient aux concepts du « management scientifique » de Taylor, les innovations de ces constructeurs automobiles étaient basées sur leurs propres idées dont la valeur pratique reste entière. »

Les lecteurs qui ne lisent ni le japonais ni l’anglais, intéressés par les méthodes d’exploitation du travail salarié connues sous le terme générique de toyotisme, peuvent se reporter à l’ouvrage de Koïchi Shimizu Le Toyotisme. D’une rare servilité vis-à-vis de l’entreprise Toyota et du clan Toyoda, l’auteur, un économiste japonais qui a écrit son livre directement en français, fournit néanmoins un portrait détaillé de l’ensemble du système Toyota. Ses descriptions sans fard, presque ingénues, d’un modèle exemplaire d’organisation planifiée de ce qui fait courir les capitalistes du monde entier : la recherche du profit, mettent en perspective l’humanisme du constructeur automobile, la négation d’une continuité entre taylorisme, fordisme et toyotisme, etc., toutes choses que Shimizu Koïchi soutient avec un sérieux ridicule.

Le Toyotisme, Koïchi Shimizu, éd. La Découverte (« Repères », n° 254, janvier 1999).

Voir aussi :

British Leyland, Ford : l’introduction des nouvelles technologies

Fiat : de nouveaux systèmes de production

SPIP | squelette | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0